2ème partie Au
BURKINA FASO
40ème émission « Radio Voix du Béarn » 95,10 Mhz, le 5 mai 2009 à 20h30
(Jean-Louis
Giordano et Jacques Mortier 2-23 décembre 2008)
Cf images http://picasaweb.google.fr/jacques.mortier/ExpedAfrik2008
Bonjour
à toutes et bonjour à tous. Une superbe expédition africaine « trait
d’union » (2ème partie), tel est l’intitulé de ma 40ème émission mensuelle de « Regards du Sud », expédition qui méritait
bien deux émissions successives http://jackdesendets.blogspot.com .
Et un scoop pour démarrer, ce sera ma dernière émission de la série, après huit années d’animation radio bénévole, mais j’en reparlerai en conclusion. Le mois dernier, nous avions détaillé l’avant voyage ainsi que la première moitié de cette tournée de trois semaines, en décembre dernier, avec les étapes maliennes : Bamako, Ségou, San, Dobwo, Mopti et le pays dogon. Aujourd’hui, nous allons poursuivre avec les étapes burkinabè et exprimer brièvement l’après-voyage.
Rappelons que nous étions deux
papys voyageurs, puisque j’avais embarqué l’ami Gigi, que j’avais
déjà
embarqué il y a plus de 40 ans à travers Canada, USA et Mexique. Rappelons
aussi que c’était un voyage « trait d’union », à multiples
motivations : découverte de l’Afrique noire pour Gigi, retrouvailles et
pèlerinage pour moi avec ce 10ème voyage sur le continent africain,
amitiés,
échanges, partage, projets, etc…
Rappelons enfin, qu’en ce qui me concerne, c’était aussi l’achèvement d’un
cycle de vie et l’entrée dans un nouveau, dans le même esprit mais avec un
redéploiement de temps, d’engagements, de priorités, etc.
II-VOYAGE déroulé :
Reprenons donc le cours de notre aventure,
avec, comme je le disais « une redoutable et mémorable transition entre
le Mali et le Burkina Faso ». Sans
aucun doute, cette étape de quelques 260km du Mali au Burkina Faso, à la
mi-parcours et à la mi-temps de notre séjour, devait être longue en ce vendredi
12 décembre, et à posteriori, ce fut bien pire avec deux demi étapes
interminables (Sévaré Koro 160 km au Mali et Koro à Ouahigouya au Burkina Faso
100km ), uniquement sur des pistes en
latérite, parfois rocailleuse. Vendredi,
jour de prière pour les musulmans, n’est vraiment pas
un jour à faire de grands voyages, mais il nous était
difficile de faire
autrement. Après avoir espéré, un instant, le remplissage du
taxi à 9 places, pour Koro, situé un peu avant la frontière, nous sommes
condamnés, pour partir, à payer pour neuf personnes. L’ami Abel négocie avec le
chauffeur pour que nous encaissions en route, s’il y avait des voyageurs
supplémentaires, et, de fait, c’est ce qui s’est partiellement passé. Nous
profitons encore et encore de ce magnifique paysage dogon, nous inscrivons dans
nos mémoires, une fois de plus, l’eau miracle
de vie et les champs d’oignons verdoyants,
nous franchissons la falaise par une magnifique passe et pas mal de virages, au cours
d’une descente impressionnante vers la
plaine, sur une piste parfois cimentée, en
direction de Kani-Kombolé au Sud. Le paysage est morcelé par tout un réseau de diguettes antiérosives, qui ont pour mission de calmer
la violence érosive des pluies à la saison, en conservant l’humus sur place, en
amont de tous ces barrages filtrants. Un coup d’œil ému au village de Bankass, où l’antenne d’Eau Vive Pau,
très remuante en Béarn et dans le Sud-Ouest, a réussi à mobiliser de nombreux
partenaires pour financer en 2008, la construction d’un forage aménagé, la mise
en place d’un Comité de gestion de point d’eau, les formations indispensables
ainsi que
l’éducation sanitaire qui va
avec. Sur la piste, où nous roulons à plus de 90km/h, traversent souvent
quelques biquettes isolées ou en troupeaux. Les « rasés » sont
fréquents, et j’assiste même, aux premières loges, à côté du chauffeur, à un
choc frontal en pleine vitesse avec une biquette, probablement suicidaire, qui
a fait volte-face sur la route. Son maigre corps est projeté immobile sur le
côté tandis que le chauffeur n’a pas levé le ¼ d’une demie seconde le pied de
l’accélérateur et poursuit sa cadence initiale. Une longue discussion avec le
chauffeur, totalement incompréhensible à nos oreilles, s’en est
suivie, à l’initiative d’une
voyageuse malienne. Nous sommes enfin arrivés à Koro. Là, après avoir payé notre
prochain trajet Koro
Ouahigouya en
minibus de 17 places, nous avons attendu quelques heures en échangeant avec le
responsable du bus, qui avait travaillé en France. Il nous a dit que deux personnes du Nigéria étaient
inscrites et attendaient depuis plus de 24h, et nous avons tout à fait compris que ce n’était
pas gagné pour aujourd’hui. Sous la chaleur écrasante, pendant que Gigi pilait
du poivre, je suis allé visiter le marché, acheter une carte téléphonique à
prépaiement, prendre quelques images de la mosquée, et également de jeunes femmes, agents itinérantes de
vaccination,
qui participaient à une grande
campagne de vaccination contre la polyomélite, avec leur musette de vaccins en
bandoulière, et un bébé sur la hanche. Au retour, après avoir mûri plusieurs
solutions, en contact avec André à Ouahigouya, et compte tenu de l’état et du
moral des troupes, nous nous sommes résignés à embarquer dans le minibus avec
les deux nigérians à destination du Burkina Faso et de Ouahigouya, en payant
pour quinze personnes
fictives. Ce fût pour nous,
malgré son coût, la meilleure solution. La frontière ne nous posa aucun problème,
à la différence de nos nigérians, et nous entrions en fin d’après-midi à Ouahigouya, vingt ans après ma première
venue ici même, au Burkina Faso, ex Haute Volta, baptisée ensuite par
l’emblématique président Thomas Sankara, Burkina Faso, qui signifie « le pays
des hommes intègres ».
5ème étape : Ouahigouya (2,5 j/3 n) : Les hasards nous bousculent encore à
Ouahigouya. Une très belle étape que je n’avais pas retenue dans mes premières
réflexions, même si j’avais déjà eu pas mal de contacts avec cette ville, dans
le cadre de jumelages avec Limoges et avec Chambéry. Toujours est-il qu’après
une première information sur mon projet de voyage adressée aux nombreux amis
africains, j’ai eu l’immense joie d’avoir un
message « électronique » en retour d’un jeune
prêtre burkinabè André Ouedraogo, un mossi, que j’ai souvent suivi à la trace,
à Koudougou puis en Côte d’Ivoire pour des études de philosophie et maintenant,
surprise à Ouahigouya, où il est professeur de philosophie au petit
séminaire. Avec l’ami
Raymond, ils sont aussi venus passer une semaine dans mon village béarnais,
André appelant même mon épouse « maman Jackie ». Aucune hésitation,
Ouahigouya sera ville-étape. Le pays dogon étant assez proche, c’est aussi
grâce à André, que par l’intermédiaire d’Armand, nous y avons bénéficié d’un superbe accueil. Cela
mérite un mot d’explication : le « réseau des amis »
fonctionne très bien en Afrique liée à la notion de solidarité : par ex.
dans le cas particulier, Armand, ami et proche d’André à Ouahigouya, était
« promotionnaire » de
Jean le vicaire général de Mopti (c’est-à-dire de la même
promotion lors d’études, au séminaire, je crois) et le transfert d’amitié
s’effectue aisément selon le schéma d’avenir que j’affectionne « les
amis de mes amis sont mes amis ». Cette notion de
« promotionnaire », de « quasi frère » est très importante
et est, me semble-t-il de même nature que les
« classes d’âge », liées aux initiations jadis
dans les traditions culturelles des diverses ethnies.
Le séjour
au cœur du séminaire, avec une belle communauté d’une dizaine de jeunes prêtres
enseignants et de deux « stagiaires », futurs prêtres en immersion,
n’inspire pas la morosité : un grand merci à tous, par l’intermédiaire de
leur responsable Hyacinthe, au grand rire malicieux. Accueil exceptionnel et
riches partages. Une pensée particulière pour mon brillant élève astronome
Aimé, j’espère que les outils fournis lui ont été utiles. Beaucoup de joie, en
particulier avec les jeunes élèves séminaristes « lycéens », auprès
desquels, nous, les deux blancs, intervenons également à l’issue d’une
célébration.
Extraordinaire
hasard encore, quand Saïbou Ouedraogo, un grand ami de Pierre Rabhi depuis sa
formation à
l’agroécologie à Gorom-Gorom, il y a plus de vingt
ans, nous annonce que tout près de
Ouahigouya, il anime avec Amédée et Ousmane, une formation au compost d’un
groupement de femmes et de quelques hommes, et nous y invite. Magnifique
matinée au village d’Aoréma, où nous ressentons une puissante envie d’apprendre
les méthodes agroécologiques de vie et de survie. C’est un grand moment aussi
quand les outils-cadeaux, offerts par « Terre et Humanisme »,
sont remis aux groupements par nos mains et aussi par celles de l’abbé André,
acclamé par la multitude de participantes et de participants, qui sont tous
musulmans. Grand moment aussi lors de la délivrance du kit-cadeau à Saïbou,
avec ouvrage, revues et semences de vie toujours accueillies avec une extrême
émotion.
Que
de bons moments, que de belles rencontres, que de rires, que de joies à
Ouahigouya et je ne pourrais que
citer :
-les amis d’André : Joanna
et Emmanuel, aux délicates attentions que
nous aurions plaisir à retrouver un jour en France. Une belle soirée, sous les
étoiles, avec mon brillant élève et déjà astronome chevronné Aimé, et
l’insatiable curiosité d’Emmanuel,
-la
visite à Armand de l’Ocades, à qui nous devons beaucoup,
-la
visite à Yako aux parents d’André, au papa
François, à la maman Claire, et à
quelques-uns de ses frères et sœurs, Jeanne, et les instits Yvette et Jean, et
bien sûr, l’accueil par les femmes du voisinage,
-les
retrouvailles, vingt après, de Sœur Blandine, maintenant Mère générale de la congrégation
internationale des Sœurs de Notre Dame du Lac,
-la visite de la nouvelle
cathédrale de Ouahigouya et les
sympathiques échanges avec le vicaire général du
diocèse, en particulier sur l’importance de la
« parenté à plaisanterie » comme lien social essentiel,
-le
grand marché aux odeurs et aux couleurs à profusion,
-le
repas dominical à l’évêché avec de nombreux prêtres, dont Henri Neveux un Père
Blanc de blanc, fidèle à son Afrique,
-les
beaux jardins maraîchers du séminaire,
-et,
bien sûr, la joie, la foi de tous ces jeunes. Nous avons été impressionnés par
la qualité des
célébrations, appuyées par de magnifiques voix au sein
d’une chorale de haut niveau. Merci à tous ces jeunes que nous avons cotoyés au
séminaire.
Ouahigouya
restera une magnifique escale. Le lendemain est prévue, en transport public,
une étape vers Toma en transitant par Tougan. L’attentionné André, en
cachottier, sans rien nous en dire, s’est rapproché d’un de ses
« promotionnaires », prêtre à Toma, Jean Zougouri, qui viendra nous
chercher à Tougan. Merci à cette belle communauté, qui m’a fait penser à la vraie
Eglise du Christ et aux premières communautés chrétiennes dans un
environnement paisible et reposant.
C’est sur cette paix que vous
propose une 1ère pause musicale
5bis-Tougan,
capitale de la région du Sourou, pays samo du Nord, devait être, à priori,
uniquement un lieu de transit, mais pour attendre notre chauffeur, André nous
avait parlé, tout près de la gare routière, de l’église et de son curé, un
personnage qu’il
affectionnait beaucoup : un de ses anciens professeurs Barthélémy Zan, qui avait été longtemps recteur de l’Université (ou
l’Institut) catholique d’Abidjan. Sans préavis, l’accueil est exceptionnel et,
dans l’attente de notre chauffeur, nous échangerons quelques quatre heures de
suite avec ce nouveau curé de paroisse, très désireux d’apprendre et de
partager sur la conduite de projets et sur l’animation des hommes. Rarement un
élève n’a été aussi vif, attentif et réactif à nos propos, à deux voix
conjuguées, mêlant concepts théoriques et expériences pratiques. Que du bonheur
dans cette transmission, quelle jubilation intellectuelle et spirituelle. Vers
17h, Jean, notre ecclésial chauffeur, avec une parente à lui, vient assurer
notre transport jusqu’à Toma.
6-Toma (1,5 j/2 n) : Que dire de Toma ? Où je me sens
chez moi, où j’ai beaucoup circulé, où j’ai vécu de grands moments, où j’ai
fait de belles rencontres, où j’ai sympathisé avec le grand historien et
regretté Joseph Ki Zerbo. C’est mon 4ème séjour ici, le 1er étant, il y a 15 ans, en 1993, puis 1998, puis 2004, puis aujourd’hui 2008.
C’est un jumelage que nous
avions lancé en 1991 entre Toma et Clapiers près de
Montpellier, qui a initié cette relation de « haute fidélité ». Ma 1ère émission de radio « Regards du Sud » rendait compte de mon voyage en
2004. Ma 37ème émission donnait la parole à Laurent Mouchague, que
j’ai commencé à initier à l’Afrique, et évoquait longuement Toma et Dobwo. J’ai
donc déjà beaucoup parlé de Toma et, pour ne pas saturer les auditeurs, je
serai plus bref. Voilà, nous arrivons donc de nuit au Centre (CAF), accueilli
par Jean Baptiste, responsable de la communauté des FSC, qui a remplacé
Emmanuel, maintenant à Dobwo. Et immédiatement, nous devons aller voir, dans sa
famille, une grande amie Sœur Perpétue, une mère Térésa bis
ou une sœur Emmanuelle bis. Sœur Perpétue s’est beaucoup
occupée du Centre des Handicapés à Toma, et nous avait aussi rendu visite à la
maison en France. Elle
n’est plus en mission à Toma et elle est venue de loin en
bus, chez sa famille, exprès pour nous saluer. Nous la découvrons avec son
frère, une autre parente et une jeune et
charmante nièce Catherine, qui, comme moi,
est à « Eau Vive ». Mais cet « Eau Vive » n’est pas le
même, c’est un restaurant réputé à Ouagadougou, tenu par une congrégation
religieuse de Soeurs, en vue de financer leurs projets. A la nuit tombée, nous
partageons de courts mais intenses moments. Puis nous installons notre
paquetage au CAF dans une grande case à plusieurs pièces, avant de retrouver la
salle à manger et le cuisinier, que je connaissais bien autant l’un que
l’autre. Un mot sur l’histoire de ce Centre, le père Michel Allaire, des
Frères du Sacré Cœur, grâce à de bons financements, avait procédé à des
forages,
et aménagé à grande allure, en 2/3 ans dans les années
1994/95, deux collines totalement stériles à Toma, la colline d’or avec
son collège, le CAF et ses jardins maraîchers et la colline d’argent,
qu’on appelle aussi l’Ermitage, avec tout un ensemble de sympathiques cases,
propices au
repos et à la méditation, je peux en témoigner. Le CAF est
important avec ses quelques 450 élèves et je citerais seulement deux projets
significatifs en cours : celui détaillé dans la 37ème émission,
où Laurent est la pièce maîtresse, à savoir après la phase achevée
d’informatisation du CAF, il s’agit de former des jeunes à devenir des
électriciens et des réparateurs d’ordinateurs. Le 2ème projet est en
cours, il s’agit de sauvegarder au mieux l’environnement du CAF, avec quatre
objectifs : 1-Mettre en défens les 10 ha de forêt
naturelle du domaine, 2-Créer et gérer un jardin polyvalent, un jardin
botanique et trois jardins maraîchers, 3-Réaliser le reboisement du
domaine de 27 ha en arbres utilitaires, en bois de chauffe, 4-Renforcer les capacités des acteurs du centre.
Quelques
points marquants à Toma, dans un créneau de temps réduit :
-réception à la mairie par le 1er adjoint
Richard Ky, que je connais bien,
-accueil
par l’ami fidèle Etienne, patron du bar « l’Entente » et ex-trésorier du
jumelage de la première heure,
-visite
avec Jean-Baptiste à l’Ermitage, la colline d’argent, où j’ai éprouvé un peu de
tristesse à voir les dégradations importantes, liées à une absence manifeste
d’entretien, mais on m’a annoncé une prochaine reprise en mains programmée,
-visite
à mon grand ami, mon grand frère Léon Ky, le 1er responsable du jumelage à mon époque et
invitation par son épouse Thérèse, au repas familial avec un poulet qui en fait
immédiatement les frais, joie simple partagée, échanges de menus cadeaux,
serrements de cœurs à notre séparation,
-Samuel, frère de Madeleine et de Marguerite, vient me chercher
pour
aller voir sa grande famille, que je connais depuis 15
ans,
-la
communauté des Frères du Sacré Cœur est composée d’un trio international : un burkinabè avec le
responsable Jean-Baptiste, un togolais, Prosper, je crois, et enfin un malien
de Ségou, David Coulibaly, qui est le fils
de Jacqueline Touré, qui avait bien connu mon frère jadis, hasard, toujours
d’improbables hasards…
Enfin,
il faut quitter Toma, accompagnés jusqu’à l’heure du départ par Samuel et le
fidèle Etienne Toë. Avant de partir vers Koudougou, le temps que se chargent
sur notre bus pittoresque, de multiples caisses en osier emplies de poulets, je
prends quelques images et, il faut bien dire que l’appareil photo numérique est
un extraordinaire créateur de liens, à fortiori quand on ne partage pas le même
langage : il facilite la relation, l’échange, la proximité et souvent
aussi le rire.
7-Koudougou (2,5 j/3 n) : C’est une escale incontournable, pour
saluer l’ami Maurice Oudet, dont j’ai parlé à de nombreuses reprises et qui a fait
l’objet de deux émissions, les 19ème et 32ème, sous la
forme
d’une interview en direct ainsi que d’une sélection
significative de ses textes. A notre arrivée, Maurice est en brousse avec un
vieil ami de collège, aussi nous faisons la connaissance de Mathias, un jeune
Père blanc allemand, spécialiste de la gestion des conflits. Et puis, encore la
cascade de hasards, de signes s’enrichit, avec Etienne de Boissezon,
qui participe comme informaticien aux projets du SEDELAN (Service d’Edition en
LAngues Nationales), dont Maurice Oudet est le responsable. Je découvre,
qu’Etienne est en fait l’un des fils de mon 1er patron à la SOGREAH
à Pau, quand je démarrais ma carrière d’ingénieur en octobre 1968, il y a 40
ans. Le père d’Etienne, mon ex-patron a 83 ans et a écrit un ouvrage
intéressant « Heurs et malheurs de l’Afrique », que je lis le soir
même. Etienne est marié à une jeune et belle burkinabè,
Judith, je crois ; ils ont deux magnifiques enfants et
nous apprécierons chez eux, au-delà de leur accueil, la qualité de la cuisine
locale ; Etienne est volontaire au sein d’une organisation internationale et il
doit, en principe, « bouger » l’an prochain. Pour arrondir ses fins
de mois, il s’occupe du conditionnement et de l’expédition de spiruline, une
micro-algue alimentaire naturelle pleine
de vertus thérapeutiques, produite à Koudougou dans ce
qu’on appelle des fermes spiruline, composées de grands bacs. Etienne nous fait donc visiter
la nouvelle ferme spiruline. Plus
tard, nous aurons le loisir d’échanger longuement avec Maurice Oudet et de
faire connaissance avec un autre Père blanc, une autre forte et attachante
personnalité Jacques
Lacour, qui
écrit une chronique régulière dans « Le pays », un quotidien
important du Burkina
Faso. Tous deux ont des blogs
qui méritent, et l’un et l’autre, d’être lus attentivement. Pour y accéder, on
les trouve facilement sur les liens de mon blog. Côté ciel, en 2004, j’avais
emmagasiné de nombreuses images de constellations du Sud, cette année, j’en ai
pris une seule à 4h du matin à Koudougou, mais je ne suis pas mécontent, car,
pour des yeux avertis, on y distingue la mythique Croix du Sud, ainsi que, faible tâche, l’amas globulaire du Centaure. Nous visitons avec Maurice et
son ami de collège, le fameux atelier
« Gandema Mamadou et fils », atelier de sculpture à la cire fondue,
une des spécialités du Burkina Faso, où les artistes s’en donnent à cœur joie
dans leur créativité débordante. Il ne nous reste plus qu’à nous acheminer vers
la capitale Ouagadougou, notre dernière escale. Jacques Lacour, devant s’y
rendre, nous irons donc ensemble sous sa conduite et nous garderons un
excellent souvenir de nos échanges tous azimuts sur ce trajet, où nous
retrouvons avec beaucoup de plaisir le « goudron » et un peu moins de
poussière.
Que diriez-vous d’une ultime pause musicale avant de rejoindre la
capitale Ouagadougou ?
8-Ouagadougou (2,5 j/3 n) : Dernière escale à la capitale
Ouagadougou du samedi 20 jusqu’au mardi 23 décembre, l’avant-veille de Noël, où
nous devons nous présenter à l’aéroport à 3h30 du matin pour un
départ à 6h. C’est un séjour quasi familial chez ma
filleule Anémone, avec ses parents Rosemonde
et Alfred Touré, et deux de leurs enfants, Anémone bien sûr qui a 18 ans et son jeune frère Amaury 14 ans ; l’aîné Antonio 20 ans, étudiant en France,
est absent mais je le retrouverai, dans quelques jours chez moi, pour les
vacances de Noël. J’ai connu la petite famille il y a 17 ans, à Montpellier, où
Alfred achevant ses études de mathématiques, était président des burkinabè de
Montpellier, soit une centaine de personnes. Pour ma part, j’étais le
président-fondateur de l’AJT, une Association de jumelage entre Toma au Burkina
et Clapiers, un joli village de la banlieue de Montpellier. Et nous nous sommes
beaucoup fréquentés en France, aussi bien entre associations amies qu’entre
familles amies. Quant à Gigi, il fait aussi un peu
partie de la famille puisqu’à Paris, il a
« paterné » quelque fois le jeune étudiant Antonio. La maman
Rosemonde, juriste de formation, est responsable d’une
entreprise de séchage de mangues qu’elle a créée, son entreprise « Rose
Eclat », est agréée bio et commerce équitable. Elle est aussi présidente
du GIE Naffa, (Groupement d’Intérêt Economique), qui est en lien étroit avec le
CEAS (Centre Ecologique Albert Schweitzer). Le papa Alfred est enseignant de
maths à la fac de Ouaga, également paysan et apporte aussi son appui à l’entreprise
familiale. Alfred n’est pas là pour nous accueillir ici, mais nous le verrons
avant notre départ, car il est actuellement à Montpellier en relation avec un
labo de maths appliqués avec qui il travaille. A Ouaga, c’est la 3ème fois que je séjourne
ainsi en famille, et je retrouve donc fidèlement et avec beaucoup de joie, tous
les quatre ans, 1998, 2004, 2008, beaucoup de personnes : la petite
famille bien sûr, la grande famille de Rosemonde également mais aussi ceux et
celles qui travaillent à la
maison ou à l’entreprise. Un mot sur cette grande et
belle famille, de milieu modeste : Antoinette, la maman de Rosemonde, a
été
veuve jeune avec six enfants et elle était sage-femme.
Rosemonde et ses cinq frères et sœurs, plutôt doués, ont, je crois, tous fait
des études supérieures, à l’époque où on pouvait bénéficier de bourses. Dans
les mêmes conditions, aujourd’hui, un tel cursus pour les six enfants serait
totalement impossible ; il serait probablement possible pour un ou
peut-être deux enfants au maximum.
Et,
pour ce dernier dimanche africain, j’aurais connu, pour la 3ème fois, la tradition du rassemblement familial, où les familles et les enfants
ont plaisir à se retrouver autour du déjeuner, par rotation chez les uns et
chez les autres. Nous étions donc une vingtaine de personnes dont une bonne
moitié de jeunes, tous plus beaux les uns que les autres, que j’ai plaisir à
voir grandir d’un coup tous les quatre ans, d’année bissextile à année
bissextile, et que j’immortalise soit par des portraits, soit par des photos. A
trois jours de Noël, Rosemonde organisa cette fête familiale supplémentaire, et
ce n’est pas rien, pour nous faire plaisir, avant notre retour en France. Les
enfants se chargèrent de faire le spectacle, en nous accueillant par de jolis mots,
et en dansant surtout, témoignant ainsi de leur sens du rythme et de leur
joie de vivre : un bien beau dimanche. Merci aux jeunes, qui sont notre avenir, merci à Cynthia, Anémone, Audrey, Amaury,
Floriane, Roxane, Karl, Djulinda, Arielle, Jean-Christian, Axelle, sans oublier
les deux absents de cette grande couvée Anaïs et Antonio.
Notre court séjour à Ouaga, fut ponctué de nombreux
échanges avec un peu tout le monde, et je n’oublierais pas Martine, Evelyne,
Adama, Eulalie... également une belle balade pédestre au bois de Boulogne
ouagalais, aux immenses statues en bois, et à proximité du barrage sur la route de Kaya, avec un
coucher de soleil, brumeux de poussière. Un tour de la capitale, découverte
pour Gigi mais familier pour moi, nous a permis d’appréhender quelques
évolutions : la nouvelle ville Ouaga 2000, son nouveau palais présidentiel, ses
monuments, ses trop riches bâtiments dans un pays très pauvre. Bien sûr, nous
visitons aussi les ateliers d’artisanat, en particulier au centre ville, j’aime beaucoup celui,
jouxtant la poste. C’est une excellente façon d’épuiser nos francs CFA, avant
notre retour.
Lors de
l’avant-voyage le mois dernier, j’avais évoqué le réseau de quatre entités
amies, ainsi que le fil directeur de notre voyage lié aux crises alimentaires.
Dans cet esprit, le 1er jour de notre voyage, à la capitale du Mali,
Bamako, nous avions initié une belle rencontre « trait d’union » avec
trois entités sur les quatre TH, EV et
l’Eglise dans sa composante éducative avec les Frères du Sacré Cœur. Au dernier
jour de cette expédition, en parfaite symétrie, à la capitale du Burkina Faso,
Ouagadougou, nous avons le bonheur d’accueillir, dans ma famille africaine, une
autre superbe rencontre avec cette fois, aussi trois des
quatre entités : le coordonnateur de l’AIDMR, l’association en relation
avec la Communauté d’Emmaüs Pau Lescar, Ablacé
Compaoré que je connais depuis des années,
ainsi que deux amis, avec qui nous étions à Ouahigouya, Saîbou Ouedraogo de TH
Burkina Faso, vu lors de la formation au compost et notre professeur de
philosophie, l’abbé André Ouedraogo, qui se sont déplacés pour nous saluer avant notre départ.
Comme
prévu, et comme en témoigne le reportage photos
accessible par mon blog, les kit-cadeaux de Noël, les ouvrages,
les revues, les sachets de graines de semences ont été offerts à des personnes
de confiance qui en feront, sans aucun doute, le meilleur usage.
Notre
retour s’effectue dans un respect scrupuleux des horaires aussi bien au départ
de Ouagadougou qu’à notre arrivée en France après trois semaines passionnantes,
qui, comme d’habitude, m’ont semblé durer trois fois plus.
III-APRES
VOYAGE
Passons donc à l’après voyage
avec le retour en France le 23 décembre 2008, veille de
Noël.
Voilà quatre mois que ce voyage s’est achevé. Il m’appartient maintenant, en
quelques minutes, de boucler cette émission. Vous aurez compris que le
voyage s’est très bien passé,
au-delà
de tout ce que je pouvais espérer. J’ai eu beaucoup de joie à découvrir Ségou
sur les traces de mon frère, joie à retrouver les amis africains, à faire
découvrir l’Afrique à l’ami, au frère jumeau adoptif Gigi, bouclant avec lui
deux expéditions que j’avais organisées, la première et la dernière à 41 ans
d’intervalle et à 65 ans d’âge chacun. Le mois dernier, j’avais insisté sur
l’importance de la préparation, aujourd’hui je mettrai l’accent sur cet après
voyage, où il n’y a pas de compte-à-rebours qui s’égrène, où, à contrario, il
faut surtout prendre le temps de la
maturation,
avec un exercice qui me passionne toujours, celui de présenter cette aventure
africaine, en s’adaptant aux divers publics, à travers une cascade d’images. Les échanges ensuite sont
toujours très riches : j’ai effectué déjà une bonne dizaine de
présentations ou videoprojections, à des jeunes, des anciens, à
Emmaüs,
à Nature et Découvertes, etc… ce qui me permet de jouer le rôle d’ambassadeur
de la Vie, ambassadeur de Terre et Humanisme, d’Eau Vive, de ce que je suis
et de ce que je porte au plus profond de moi-même. Et logiquement, comme au
cours de ce voyage, et aussi tout au long de ces émissions, les réponses aux
crises alimentaires sont toujours développées avec « le manger propre
et le boire potable », en unissant ainsi « Terre et
Humanisme » et « Eau Vive ». De nombreuses autres sollicitations
m’attendent encore au fil de cette année.
En
scoop introductif, je précisais que cette 40ème émission radio, de vagabondages à travers le Mali et le Burkina Faso, serait la
dernière de la série « Regards du Sud ». La 1ère émission
était déjà
centrée sur un voyage en 2004 au Burkina Faso, que je
faisais découvrir à deux autres amis et aujourd’hui, le présent bouclage au
Burkina Faso à la 40ème me paraît conclure harmonieusement cette
série. C’est bien l’achèvement d’un cycle avec 4 années d’émissions
radio astronomiques « A la découverte du ciel » pour explorer les
merveilles du cosmos, c’est-à-dire l’environnement de notre planète et de notre
humanité. Et ensuite, 4 années pour la présente émission humaniste, soit en résumé huit années et 84 émissions, en partage, pour
connaître, comprendre, contempler, construire, aimer et faire aimer notre
monde, notre planète et son humanité. J’ai aussi choisi d’autres
achèvements simultanés : l’animation de ski pour de jeunes scolaires, les
mandats d’administrateurs de Radio Voix du Béarn, de Terre et
Humanisme
et d’autres engagements encore. J’ai beaucoup aimé tous ces engagements, ce
travail de radio aussi, dans une liberté totale, être chercheur et passeur,
être trait d’union. J’ai beaucoup apprécié ce travail de la pensée, qui
nécessite le temps de la maturation. Et je vais, sans aucun doute, le
poursuivre sous d’autres formes.
Ce changement programmé de cycle
de vie, après l’initiation et l’action, conduit au temps de la transmission
et de la sagesse pour, au moins, les trente
prochaines
années, si Dieu veut. Il ne s’agit en aucune façon d’une baisse de passion de
Vivre ou d’une infidélité aux amis, mais plutôt d’un redéploiement pour « Vivre pleinement le Présent dans la Proximité »
avec quatre principes de base souvent rappelés ici : « Fédérer sur
l’essentiel, S’appuyer sur le présent et l’existant, S’enrichir de nos
différences, Mettre en synergie nos réseaux ». Et aussi, quatre
priorités actuelles pour moi : « Etre dans l’Essentiel de plus en
plus, Entretenir mon enthousiasme vital, Retrouver un rythme harmonieux, Etre
« trait d’union » de mieux en mieux », d’où découlent trois
chantiers passionnants, à privilégier encore plus : le 1er est
la Famille puisque nous sommes pivots heureux
de quatre générations, le 2ème chantier est l’Eglise locale à construire, c’est une véritable
mutation à conduire, dans une situation actuellement difficile de l’Institution
Catholique. Le
concile
Vatican II, dans les années 1965, m’avait enthousiasmé par son ouverture au
monde et se trouve toujours d’actualité, en particulier pour une véritable
coresponsabilité prêtres-laïcs. Dans un contexte de pénurie de prêtres chez
nous, les laïcs doivent s’atteler, avec leurs compétences spécifiques et le souffle
de l’Esprit, à la construction de « l’Eglise de demain », main dans
la main avec la hiérarchie, qui doit résolument accepter de leur faire
confiance, le 3ème chantier est, en principe, l’Ecriture, progressive, sans précipitation, d’un
document qui pourrait s’intituler « Projet de
Vie : Passion de Vivre » avec le même sous-titre que la
présente émission « Comment construire tous ensemble un monde plus
fraternel ? ». Cela se voudrait un métissage de la mémoire, de la
pensée, de rencontres prolongeant et élargissant cette émission radio.
Avant
d’achever cette émission, je vous rappelle que vous pourrez retrouver textes,
sons et images de toute la série « Regards du Sud » sur mon blog (http://jackdesendets.blogspot.com),
où il est facile d’entrer avec un moteur de recherche, en indiquant 3
mots : monde, fraternel et mortier comme le mortier. Dès à
présent, vous y trouverez quelques textes sur notre voyage, en accédant
également à un vaste reportage photos et très prochainement ces deux dernières
émissions s’y positionneront aussi. Il
est probable que ce blog sera ensuite mis temporairement en jachère, avant de
s’enrichir différemment. J’adresse donc à chacune et à chacun, un fraternel bonsoir,
avec un grand merci pour votre attention, un
souhait de bon vent et à une prochaine occasion.
Vive la Vie
lectures...