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Les grandes lignes de notre Projet

3ème émission avril 2005

 

                   I.         Introduction.

 

Bonjour à toutes et bonjour à tous. Bienvenue à ceux qui nous rejoignent pour la 1ère fois, ainsi qu’aux fidèles auditeurs. Aujourd’hui 3ème épisode de l’émission « Regards du Sud », sous-titrée « Comment construire, tous ensemble, un monde plus fraternel ? ».

 

Quatre valeurs majeures dans notre approche : respect, solidarité, responsabilité, priorité aux plus démunis. L’énoncé de ce projet peut faire peur, nous irons donc « doucettement », progressivement, comme si c’était un jeu de construction, en développant chaque mois un ou plusieurs thèmes, en analysant quelques actualités significatives et en découvrant un peu mieux le Sud à travers des histoires.

 

Ce mois-ci c’est prioritairement l’aspect méthode, qui sera abordé avec le thème « Gestion de notre projet », qu’on peut appeler aussi « Les grandes lignes de notre projet » et que nous résumerons en trois questions essentielles : « Dans quel monde sommes-nous ? Où voulons-nous aller ? Comment y aller ? ».

 

                 II.         Définitions, évolution historique.

 

Juste avant de nous pencher sur notre projet, commençons par exprimer quelques généralités sur la « gestion de projet » :

*      Pour tout projet, il y a toujours 3 phases importantes : description de la situation actuelle, c’est-à-dire où en sommes-nous ? Schéma futur souhaité c’est à dire où voulons-nous aller ? Et enfin quel chemin pour passer du présent au futur c’est à dire comment y aller ?

*      Un mot sur chaque phase : la 1ère phase du « constat actuel » est primordiale à établir avec l’ensemble des acteurs et demande du temps car c’est un premier partage entre les acteurs et l’apprentissage d’un travail en commun.

*      La 2ème phase précisant le schéma futur souhaité permet de frotter les différents points de vue et de se mettre d’accord sur là où on veut aller à moyen terme et à long terme. Il est important dans cette phase de bien se positionner dans le moyen terme, ce qui permet à chacun de dépasser sa propre situation personnelle.

*      La 3ème phase essaie de définir le chemin pour passer du présent au futur. L’expérience montre que cette phase se décompose souvent en deux.

*      D’abord des réponses à apporter à assez court terme, en cohérence avec le schéma futur, à une question du type : « Quels sont les problèmes urgents à régler en priorité ? ». Cette sous phase n’est pas à négliger car elle permet à chacun de se rendre compte rapidement que cela va dans le bon sens et est de nature à créer la confiance et à calmer les impatiences liées à la durée de la 2ème sous phase.

 

Celle-ci prend plus de temps et consiste à organiser une structure de projet pour réfléchir, partager, avancer, conduire et réaliser dans la durée le projet.

 

Un mot sur les acteurs d’un projet collectif :

Un grand africain a dit « Il y a 3 catégories de personnes : les dormeurs, les généreux et les égoïstes ». Il exagère certainement …mais il a le mérite d’interpeller chacun. Pour ma part, je serai plus nuancé que lui, j’aurai envie de dire qu’en chacun de nous il y a ces 3 composantes de dormeur, de généreux et d’égoïste. Et puis, selon les circonstances, les périodes de la vie, les caractères de chacun, l’ambiance générale, une composante peut apparaître dominante chez certaines personnes. Et il sera intéressant aussi d’appliquer la formule de ce grand africain à l’échelle des pays : pays dormeurs, généreux ou égoïstes ? A l’échelle des continents ? A l’échelle du monde.

 

Revenons à notre projet « Comment construire, tous ensemble, un monde plus fraternel ? » :

*      1ère phase - Dans quel monde sommes-nous ?

Regards du Sud veut élargir nos regards aux dimensions du monde.

Aussi multiplions nos regards pour décrire l’état de notre monde actuel :

*      Un 1er regard global sans complaisance : Nous l’avons déjà dit nous sommes dans un monde paradoxal où il y a des intelligences, des compétences, des énergies, des générosités exceptionnelles, mais hélas aussi un monde où les riches sont de plus en plus riches, et les pauvres de plus en plus pauvres, un monde en guerre économique de plus en plus rude et assassine, où tous les coups sont permis, où gaspillage et pillage de la planète sont la règle, où de nombreuses maffias sont à l’œuvre et s’organisent, où cette absurdité qu’est la guerre, fait encore partie du quotidien de notre monde. Quelques chiffres : 225 personnes de la planète auraient un revenu équivalent à 47% de la population mondiale. La fortune des 3 personnes les plus riches de la planète serait supérieure au PIB des 48 pays les plus pauvres.

*      Un 2ème avec un regard astronomique : tournons-nous vers le lointain passé pour mettre en perspective l’évolution de notre monde naissance de notre Univers avec le Big Bang il y a 15 milliards d’années, puis naissance de notre Galaxie il y a quelques 10 milliards d’années, du système solaire avec notre planète Terre il y a 4 milliards et demi d’années et très * rapidement ensuite apparition de la vie, c’est-à-dire des premières cellules vivantes, les bactéries, il y a 3,8 milliards d’années, ensuite les plantes, les animaux, un foisonnement d’espèces, dont les premiers hominidés il y a quelques 4/5 millions d’années et l’homme moderne vient tout juste d’arriver il y a quelques 180 000 ans. Si l’Univers avait un an, c’est-à-dire calons le Big Bang au 1er janvier à 0h, et aujourd’hui étant le 31 décembre à 24h, l’histoire de l’homme se déroulerait dans la soirée du 31 décembre. Quelques dates dans ce calendrier : apparition des premiers hominidés le 31 décembre vers 22h, peinture des grottes de Lascaux à 23h59mn, début de l’ère chrétienne à 23h59mn56s et début de l’ère industrielle il y a une petite demi-seconde. Il apparaît clairement que l’homme vient d’arriver sur notre planète et, en peu de temps, il a, à la fois exprimé son génie dans de multiples domaines et il a aussi fait beaucoup de bobo à ses congénères et à sa planète Terre, mais, gardons lui confiance, il ne savait pas tout ce que l’on sait aujourd’hui. Il était à 4 pattes, il l’est encore un peu, mais, courage, il devrait bientôt se tenir debout dans toute son humanité.

*      Un 3ème avec un autre regard scientifique : Une caractéristique générale de l’évolution aussi bien de l’Univers, de la vie, de l’homme et des sociétés humaines est la complexité croissante avec des stades d’organisation mieux adaptées et emboîtés comme des poupées russes. En restant simple, au niveau de l’Univers : planète, étoile, galaxie, amas de galaxies, super amas de galaxies, au niveau des systèmes vivants : atomes, ADN, chromosome, cellule, tissu, organe, organisme, espèce (dont l’homme, espèce parmi 3 millions d’autres espèces) ; au niveau des sociétés humaines : chasseur/cueilleur, agriculteur, village et ville, pays, groupement de pays, planète entière.

*      Un 4ème avec un regard historique : Nous venons de sortir en 1991 d’un ½ siècle de monde bipolaire Est/Ouest avec deux blocs face à face USA/URSS et les autres pays du Nord et du Sud se positionnant par rapport à ces blocs. Nous sommes entrés dans un monde multipolaire : USA, Europe, et de nouveaux grands potentiels : Chine, Inde, Brésil, avec toujours des pays pauvres, le tiers monde sans oublier aussi les pauvres des pays les plus riches : le quart monde. Les pays forts de l’Ouest (USA, Europe) ont construit des règles du jeu à leur propre bénéfice pour rester les plus forts, des règles bâties sur une mondialisation guerrière des échanges avec ouverture des marchés pour vendre et saturer le monde de leurs produits.

*      Un 5ème avec un synthétique regard d’artiste sur ces 4 points cardinaux du monde. Je crois que c’est Higelin ou peut-être Lavilliers qui chante « les cassés de l’Est, les stressés de l’Ouest, les rusés du Nord, les usés du Sud ».

*      Un 6ème avec enfin un regard d’espoir, un regard spatial amoureux : Jean-Loup Chrétien (Clairs de terre Bordas) représentatif de ceux qui sont allés là-haut : « Après quelques heures, l’homme de l’espace a le nez collé aux hublots et s’extasie, après * quelques jours il perfectionne ses connaissances géographiques, après quelques semaines il rêve à ce qui se passe sous ses pieds, à la Nature qui vit, aux cris des enfants, aux chants des oiseaux, au bruissement du vent dans les feuilles des arbres, après quelques mois, ces hublots sont une ouverture sur le paradis, et la mission devient une épreuve…Oh Terre, des sondes automatiques ont visité tes sœurs planètes du système solaire…Il n’y a pas de doute, parée de ta fragile robe bleue et blanche, tu es de loin la plus belle, éblouissante dans ce bleu phosphorescent sur fond noir de néant, la plus accueillante de tes rivales ne peut nous offrir que le Sahara, mais un Sahara où il faudrait vivre en scaphandre, par des températures évoluant entre -50° et +100°. Avant de savoir s’il en existe de plus belle que toi, ce qui n’est pas pour tout de suite, ni pour demain, sachons te préserver et te donner enfin le soin et le respect que tu mérites pour tout ce que tu nous donnes. Puisses-tu le donner encore à notre descendance ».

 

*      2ème phase - Où voulons-nous aller ?

Pour répondre à cette question, bien sûr, de nombreux intervenants vont s’exprimer. Mais d’abord, il m’a semblé que chaque pays avait déjà répondu à cette question en choisissant les mots de leur devise nationale. Je vous propose un inventaire : au niveau des grands pays et des devises sympathiques.

USA En Dieu nous avons foi

Chine Compter sur ses propres forces

Inde Seule la Vérité triomphe

Russie (URSS) Prolétaires de tous les pays, unissez vous.

Brésil Ordre et progrès

Nicaragua Pour le bien du monde

Paraguay Paix et justice

Turquie Paix dans le pays, paix dans le monde

Ukraine Liberté, Accord, Bonté

Mali/Senegal Un peuple, un but, une foi

 

5 pays affichent la fraternité :

Benin Fraternité, Justice, Travail.

Mauritanie Honneur Fraternité Justice

Niger Fraternité, travail, progrès

France/Venezuela Liberté, égalité, fraternité

Indonésie L'unité dans la diversité

UE (dans le projet de constitution) Unie dans la diversité

 

On retrouve souvent les mêmes mots : paix, justice, liberté, union, diversité.

 

* Maintenant place aux intervenants :

Willy Brandt en 1990 :

« Lorsque nous pensons aux 800 millions, voire au milliard d’individus qui végètent dans la misère absolue, l’objectif principal du développement doit être d’offrir, à ces êtres humains, une vie digne d’être vécue. Il importe donc de satisfaire les besoins vitaux de tous, et partout, en matière d’alimentation, de santé, d’habitat, d’éducation et pour ce qui est du droit à participer à la vie de la cité. Plus de justice et de solidarité humaine : voilà le leitmotiv de la société mondiale ».

 

Ghandi :

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« Il y a assez de tout dans le monde pour satisfaire aux besoins de l’homme, mais pas assez pour assouvir l’avidité de quelques uns ».

Les riches doivent vivre plus simplement pour que les pauvres puissent simplement vivre.

 

 

 

 

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Simone Veil (60ème anniversaire libération d’Auschwitz) : Lutter contre le racisme et l’antisémitisme pour qu’enfin le « plus jamais ça », devienne réalité dans un monde fraternel, fondé sur la dignité humaine. Nous appartenons tous à la même communauté des hommes.

 

 

 

 

* Un béarnais que j’apprécie JC Guillebaud (Refondation du monde édit Seuil) :

 

« refonder le monde, ce n’est pas seulement résister à la barbarie, c’est redéfinir loyalement ce qui nous rassemble et vers quel futur nous voulons marcher ».

 

 

 

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Le neuropsychiatre Boris Cyrulnik :

 

« on a tous des raisons de se faire la guerre, on peut décider de vivre ensemble en paix »

 

 

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Pour l’essayiste américain Jeremy Rifkin, l’idéal européen est plus prometteur dans un monde en crise et globalisé, que le rêve américain fondé sur l’individualisme.

 

 

 

 

 

 

S’il fallait résumer les 2 premières questions dans quel monde sommes-nous ?

Et où voulons-nous aller ? J’appellerai à la tribune notre grand africain avec ses 3 catégories : dormeur, égoïste et généreux. Et, nous serions certainement d’accord pour dire que le monde actuel est égoïste et qu’il doit devenir généreux (ou solidaire ou fraternel selon la formulation souhaitée par les uns ou par les autres).

 

*      3ème phase - Comment y aller ? (individuel/collectif)

Précisons qu’il s’agit ici d’une esquisse sommaire. En résumé, nous sommes entrés dans une période d’exceptionnelle mutation de l’histoire, débouchant sur un nouveau niveau d’organisation humaine qu’on peut appeler « mondialisation » et qui nécessite de faire évoluer profondément les fondements de notre « vivre ensemble ». Des virages sont à négocier, des orientations à inverser, des diversités à préserver. Nous avons, nous humains, plein d’atouts potentiels en nos mains, si nous le voulons, et si nous voulons faire les uns avec les autres plutôt que les uns contre les autres, si nous élargissons nos regards et si nous nous unissons sur l’essentiel.

 

Essayons d’avancer quelques pistes, avec l’appui d’intervenants :

 

L’astrophysicien Laurent Nottale, dans l’esprit de sa théorie de la « relativité d’échelle », qui pourrait aussi s’appeler la théorie des « poupées russes », évoque le passage il y a un milliard d’années du monocellulaire au pluricellulaire. Il nous dit : « la nouvelle structure complexe n’a pas effacé l’ancienne...c’est un nouveau niveau d’organisation qui est apparu. Non * seulement il n’a pas supprimé le stade unicellulaire, mais au contraire il le protège et augmente ses possibilités de survie ».

 

Et Laurent Nottale élargit son propos aux sociétés humaines : « Ce système peut être étendu à l’organisation sociale. Nous pouvons vivre au niveau des associations locales, de la ville, de la région, de la nation, de l’Europe, de la planète : aucun de ces niveaux ne doit se substituer aux autres, tous sont nécessaires, peuvent avoir leur mode d’organisation démocratique propre, et assurer la cohésion du tout par une double communication, entre éléments d’un même plan (par exemple les pays européens entre eux), mais aussi entre échelles différentes (Europe et Etat ) ».

 

Voilà ce nouveau niveau planétaire a déjà été évoqué, directement ou indirectement par plusieurs, qui ouvrent ainsi des pistes :

*      L’écrivain et journaliste Jean-Claude Guillebaud (Le goût de l’avenir) – « la plupart de nos analyses, de nos discours et de nos querelles campent dans un passé révolu et entretiennent des oppositions d’autant plus théâtrales qu’elles deviennent sans vrai contenu ».

*      Déjà en février 1954, Abbé Pierre« Seule la générosité peut garantir la liberté et la paix », « La seule guerre juste...la guerre à la misère. Nous en avons assez d’être partisans de causes plus petites que celles de l’univers ».

*      Certains politiques aussi insistent sur les virages à négocier : la dimension planétaire à prendre en compte, la parole au tiers monde, le courage politique, et des changement de priorités.

 

Willy Brandt en 1990 « La problématique du Tiers Monde était jusqu’alors placée de façon bien trop accessoire dans les ordres du jour de nos assemblées nationales et européennes. Et ce qui nous préoccupait est largement débordé par une problématique politique et économique qui se situe à l’échelle du monde ».

 

Au sujet des réformes du mode de fonctionnement des institutions internationales, il évoque « un droit de parole plus large en faveur des pays du Tiers-Monde,…et il dit aussi : c’est de courage que l’on manque le plus ».

 

* Jacques Delors en 1994 « Pour entrer dans le XXIème siècle » : « il est important de mettre au point un projet de société axé sur une meilleure qualité de vie dans la CEE, susceptible de motiver la population …une révision systématique des politiques …actuelles…car mises en œuvre sur des considérations à long terme ne correspondant plus à l’objectif du développement durable. Cela s’applique encore plus aux politiques dans les domaines de l’énergie, des transports, de l’industrie et de l’agriculture, où plusieurs des choix faits dans les années 50 et 60 doivent être revus »

Action des citoyens sur le politique : action conjuguée des politiques et des citoyens.

 

Abbé Pierre en 1952 « Si vous tous, vous faites pression à tous les échelons des pouvoirs publics, si l’opinion publique le voulait, les choses bougeraient ! Parce qu’ils tiennent à être réélus, les élus font ce que veut le public. Ce qu’ils ne font pas, c’est parce que le public ne l’exige pas ».

Importance de l’opinion publique :

Simone Weil « c’est parce que des citoyens ont abdiqué que les camps de concentration ont pu voir le jour ».

Abbé Pierre « toutes les dictatures, tous les terrorismes, tous les fascismes ont commencé parce que devant les premiers viols du droit, on est resté muet. Il faut toujours alors se lever et crier à l’injustice ».

 

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Einstein « Le monde est dangereux à vivre. Non pas tant à cause de ceux qui font le mal, mais à cause de ceux qui regardent et laissent faire »

 

 

 

 

Gandhi « Nous devons être le changement que nous voulons voir dans le monde ».

Rôle des élites : Abbé Pierre en 1964, en France « La misère, c’est la désertion des élites ».

Un proverbe africain « l’esprit a beau faire plus de chemin que le cœur, il ne va jamais aussi loin ».

 

Rassurez-vous, je ne perds pas de vue la question « Comment aller du monde présent au monde futur souhaité ? ». Nous avons déjà des éléments de réponse importants : la succession de niveaux d’organisation interpénétrés du local jusqu’au planétaire est à prendre en compte sérieusement, solidarités plutôt que guerres déclarées hors-la-loi, lutte contre tout racisme, rôle essentiel des opinions publiques pour faire bouger ou appuyer les responsables politiques, volonté et courage politique, mobilisation sur l’essentiel la plus large possible : citoyens, associations, partis, religions, intellectuels, artistes, jeunes, anciens, handicapés, malades, démunis,...tous ensemble au coude à coude.

 

Préparant cette émission, j’ai été étonné de découvrir le travail de fond qui est à l’œuvre dans diverses associations, divers organismes, dans divers pays et qui vont dans le bon sens.

 

Par exemple avez-vous entendu parler des OMD : les Objectifs du Millénaire pour le Développement. Les huit objectifs du Millénaire pour le développement (OMD) visent à combattre la faim et la pauvreté, à améliorer l’éducation, la santé, le statut des femmes et l’environnement. Ils sont tous étroitement liés. Les 7 premiers objectifs se réfèrent au développement humain dans les pays du Sud. Le 8ème constitue la condition sine qua non de la réalisation des 7 autres. Il appelle explicitement les pays du Nord à mettre en œuvre des politiques économiques favorables au développement au sein d’un partenariat mondial pour le développement. A ce jour, 191 Etats, membres des Nations Unies, ont approuvé la déclaration du Millénaire (signature en l’an 2000).

Je cite ces 8 objectifs :

*      Réduire l'extrême pauvreté et la faim

*      Assurer l'éducation primaire pour tous

*      Promouvoir l'égalité des sexes et l'autonomisation des femmes

*      Réduire la mortalité infantile

*      Améliorer la santé maternelle

*      Combattre le VIH/sida, le paludisme et d'autres maladies

*      Assurer un environnement durable

*      Mettre en place un partenariat mondial pour le développement.

 

Les OMD ne sont pas la panacée. Ils constituent cependant l’engagement le plus tangible pris par la communauté internationale pour éradiquer l’extrême pauvreté. En cela, ils constituent une première étape à atteindre vers l’accès de tous à des conditions de vie décentes et respectueuses des droits humains. Et le calendrier international fait de 2005 une année décisive. En effet, en septembre 2005 une AG de l’ONU fera le bilan à mi parcours des objectifs 1995/2015. Ces objectifs vont dans le bon sens, mais, à l’heure actuelle, ils ne seront pas tenus sans changement de vitesse. Les opinions publiques seront sollicitées pour dire oui à la lutte contre « l’extrême pauvreté et la faim » et pourront affirmer leur solidarité par le port d’un bandeau blanc.

 

Dans le même esprit, en septembre 2004 un rapport de l’ONU fait évoluer le débat sur la mondialisation de la confrontation vers le dialogue et fournit un terrain d’action commune pour l’avenir. Une des conclusions majeures du rapport est qu’il est indispensable de parvenir à une mondialisation équitable pour assurer la prospérité mondiale, la paix et la sécurité. Un système multilatéral des Nations Unies renforcé est perçu comme l’outil qui permettra de réaliser les réformes nécessaires et assurer la cohésion entre les politiques économiques, sociales et environnementales à l’échelon international.

 

Par ailleurs, de très nombreux organismes approfondissent réflexions, expérimentations et actions dans le même esprit : citons par exemple et je ne suis pas exhaustif TPF, Alliance 21, les Forums sociaux mondiaux, continentaux, nationaux et locaux, Coordination Sud, Equi-Terre commerce équitable, Agir ici, Oxfam, Fondation Nicolas Hulot, Secours populaire, Secours catholique, Terre et Humanisme, CCFD, Energies solidaires, Action contre la faim, Association Max Havelaar, association H-50,…sans oublier partis, syndicats, religions, et autres..

 

               III.         Actions urgentes et prioritaires.

 

Si je reviens un instant au grand africain qui nous parlait des dormeurs, des égoïstes et des généreux, il me semble qu’il s’agit d’éveiller en nous la composante dormeur qui sommeillait pour être acteur et créateur de ce monde plus solidaire, plus fraternel qui a besoin de chacun de nous. J’ai apprécié la formulation d’une campagne : « solidaire-toi, pour être proche de ceux qui sont loin sans être loin de ceux qui sont proches »

 

* Actions de solidarité en relation avec l’agenda : OMD et le calendrier est exceptionnellement dense en 2005.

La faim dans le monde : aujourd’hui, on sait comment régler ce problème : « la souveraineté alimentaire », qui nécessite de modifier les règles de l’OMC (Organisation Mondiale du Commerce). Nous en reparlerons au cours de cette année. Le philosophe Voltaire écrivait déjà au 18è siècle : « La bonne politique a le secret de faire mourir de faim ceux qui, en cultivant la terre, font vivre les autres », et Marc Aurélio Garcia, conseiller du président brésilien pour les affaires internationales « La faim est la principale arme de destruction massive dans le monde ».

 

Depuis plusieurs années, le PNUD (Programme des NU pour le développement) estime les sommes nécessaires au financement de l’accès de tous à l’école, à l’eau potable et aux soins de base. Ces sommes sont évaluées à 80 milliards de dollars par an pendant 10 ans. Quand on sait que le service de la dette des pays en voie de développement engloutit plus de 300 milliards par an, que les dépenses militaires s’élèvent à 800 milliards, que les subventions agricoles des seuls pays riches représentent 350 milliards, on prend l’exacte mesure du problème.

 

En relation avec la faim, un mot sur la situation des paysans dans le monde. Aujourd’hui, les paysans sont 1,3 milliards et ils représentent la moitié de la population active du monde. 800 millions d’entre eux ont un simple outil de travail, comme une houe, et sont en sous-nutrition permanente, 300 millions pratiquent la culture attelée, et 28 millions disposent de matériel agricole motorisé. Ces derniers 2% de paysans bénéficient de forts soutiens publics et les écarts de productivité entre les gros et les petits vont de 1 à 100. Un double hommage aux paysans du monde, aux présents et aussi aux anciens, nos pères, grands pères ou arrières grands pères étaient tous paysans :

*      le paysan est le gardien de la vie. Il est comme les racines de l’arbre. Si quelqu’un passe, il voit les feuilles, les fleurs, les branches. Mais quelque chose soutient l’arbre : ce sont les racines. Le paysan, c’est les racines.

*      un paysan poète anonyme chinois exprimait ainsi « la vie du paysan » vers 2300 avant JC, il y a presque 5000 ans : « Du petit jour / Jusqu’au couchant / Je sue et laboure mon maigre champ. // Je creuse un puits / Sème mon grain, / Mange mon riz / Et boit mon vin. // Que peut me faire / Le Gouvernement ? / S’il n’y a pas de guerre, / Je resterai vivant ».

 

             IV.         Quelques actualités significatives :

 

Saviez-vous que 2004 était l’année de la fraternité ? Savez-vous que 2005 est l’année du micro-crédit, année du Brésil en France, année de la réforme des Nations unies, année des Objectifs du millénaire pour le développement, l’année de la fin du cycle de Doha et du développement pour l’OMC,...attention : trop d’information tue l’information.

*      Max Havelaar : très bonne nouvelle, naissance du coton équitable. 9 entreprises ont décidé d’adopter un label « coton équitable ». Nous en reparlerons car le coton est au cœur du débat Nord-Sud.

*      Brésil, Venezuela, Argentine, pays d’Amérique latine tracent leur sillon dans ce monde multipolaire, avec un regard envieux sur l’Europe, et peut-être des perspectives d’une Union d’Amérique du Sud.

*      Dans les infos locales : un grand festival africain sur le campus de la fac de Pau du 6 au 14 avril avec de nombreux partenaires pour promouvoir la culture africaine (Ouest, centrale, Maghreb), pour ressentir l’Afrique, pour réfléchir sur l’Afrique. Il y aura expo, dégustations, spectacles, conférences, films et reportages, naissance à Pau d’une coalition d’associations, intitulée « Tous pareils, tous différents », pour promouvoir l’éducation contre le racisme à travers l’apprentissage des différences dans la découverte des autres cultures.

               V.         Histoires du Burkina Faso.

Retrouvons Talato dans son village :

Le mois dernier, nous vous avons présenté Talato, une jeune fille de 14 ans, d’un des 8000 villages du Burkina Faso (cela se prononce Bourkina Fasso  et s’écrit BF). Elle nous avait fait découvrir sa vie au village. Aujourd’hui, nous allons encore rester chez elle pour parler un peu du pays et des travaux des champs.

Rappelons que le pays de Talato est un pays de l'Afrique de l'Ouest, situé à l'intérieur des terres.

* La population du Burkina, de quelques 13 millions d’habitants, est jeune : 50 % de la population à moins de 15 ans : 24 % ont entre 15 et 30 ans. 21 % ont entre 30 et 60 ans. 5 % ont plus de 60 ans.

90 % de la population vit de l'agriculture et de l'élevage. La vie au Burkina est marquée par son climat tropical qui comporte deux saisons très contrastées. Une saison des pluies, (de mai-juin à septembre-octobre), et une saison sèche, de plus en plus longue au fur et à mesure que l'on va vers le nord.

85 % des surfaces cultivées sont consacrées aux céréales, surtout le sorgho (appelé gros mil) et le millet (appelé petit mil au Burkina). Mais la production de maïs augmente chaque année dans le sud du pays, (ainsi que celle du riz). Pour l'essentiel, ces céréales sont consommées sur place ou dans les villes du Burkina.

Le Burkina est également un grand producteur de coton. En 1998, le coton représentait plus de 70 % des recettes d'exportation. Il procure des recettes financières à plus de 2 millions de personnes. La culture du sésame est encore faible, mais en plein développement.

L'élevage est la 2ème ressource de l'état. Il représente environ 14 % des exportations (10 % pour les animaux et la viande, et 4 % pour les cuirs et les peaux).

L'or demeure le 3ème produit d'exportation (près de 7 % en 1996). Il s'agit surtout d'exploitations traditionnelles (orpaillage), et non industrielles.

 

Le Sud Ouest du pays, plus clément que le Nord sahélien, est plus diversifié avec des cultures de riz, de coton et de canne à sucre.

Allons voir maintenant concrètement les travaux des champs.

* Quand tombent les premières pluies en mai-juin, ceux qui pratiquent la culture attelée, préparent le sol. Dans le nord du pays, le plus souvent, ceux sont les ânes qui tirent la charrue. D'autres se précipitent pour semer sans préparer le sol. Pour ce travail, certains se courbent toute la journée, mettant les graines en terre à la main, et refermant le poquet avec leurs pieds. Ailleurs, ce travail se fait en deux temps. Quelqu'un prépare les trous avec un semoir fixé au bout d'un long bois. Puis une autre personne passera mettre les graines en terres et les recouvrir. Bientôt ce sera le temps des cultures. C'est une course de vitesse entre le mil et les mauvaises herbes. Pendant un mois, il faut travailler dur pour arracher les mauvaises herbes.

 

Au mois d'août, quand le mil a grandi, il faut repasser désherber à nouveau, mais cette fois on est un peu moins pressé : le mil a déjà gagné la partie. *

 

Pendant ce temps les enfants sont chargés de garder le petit bétail : les chèvres et les moutons. Cela se fait souvent par quartier. Toutes les bêtes d'un même quartier sont rassemblées en un seul troupeau, et les enfants de ce quartier les gardent ensemble. Quand les pluies sont abondantes, les récoltes en octobre/novembre sont bonnes, et c'est la joie au village. Quand les pluies n’ont pas été au rendez-vous, c’est moins bon et la période de soudure pour arriver à la prochaine récolte peut être très difficile. La récolte est en principe partagée en 3 parts inégales : les plus beaux épis sont mis de côté pour les semences de l’année à venir, la plus grande partie va au grenier à mil pour la nourriture de l’année, une faible part est vendue pour disposer d’argent pour les divers besoins de l’année. Voilà le cycle économique de la majorité de la population, dans sa grande simplicité, qui rappelle aux plus anciens que c’était comme cela chez nous, il y a moins d’un siècle.

Références.

*      Site internet www.abcburkina.net

*      Lire « Les arbres de l’évolution » à trois auteurs (astrophysicien Laurent Nottale, paléontologue Jean Chaline, économiste et sociologue Pierre Grou), ouvrage passionnant pour tous lecteurs… éditions Hachette littératures et aussi de L Nottale « La relativité dans tous ses états » pour scientifiques,

*      JC Guillebaud : le goût de l’avenir, la refondation du monde, le principe d’humanité,

*      Site de la SAPO, plusieurs émissions d’astronomie à Radio Voix du Béarn, en relation avec une meilleure connaissance de notre monde : climat et soleil, structure de l’Univers, la vie extra terrestre,…Pour trouver le site, il suffit avec un moteur de recherche (par ex google) d’indiquer « SAPO astronomie »

 

             VI.         Thème prochain.

 

En terminant cette émission, je voudrais dire à ceux qui nous écoutent tout le plaisir que j’ai à préparer cette émission, même si j’y passe beaucoup plus de temps que prévu : travail de mémoire, de réflexion, de recherche, d’échanges...C’est enrichissant et passionnant à la fois.

 

Le mois prochain, le 4ème épisode sera centré sur l’Europe. Il y aura beaucoup de choses à dire sur ce niveau d’organisation intermédiaire entre le pays et la planète.

 

Et donc à très bientôt, avec mon fraternel bonsoir.

 

 


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